Max Reger: un organiste de foi

Brand (Bavière) 1873 - Leipzig 1916

Compositeur allemand

 

Je souhaite faire découvrir ce grand compositeur qui toute sa vie durant, témoigna sa foi envers le créateur (tout comme J.S. Bach). En tant qu'interprète, ce fut pour moi une découverte; cette musique est passionnée, passionnante et, comme beaucoup le lui reproche, difficilement abordable techniquement; mais quand cette barrière est franchie, Reger nous emmène dans un univers spirituel profond.
Dans la rubrique 'adresses internet', vous trouverez un site qui lui est entièrement consacré. Bonne lecture.

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Johann Baptist Joseph Maximillian Reger, né le 19 Mars 1873 à Brand, au coeur des sapinières bavaroises, connait une enfance heureuse, dans la ville provinciale de Weiden, dans le Haut Palatinat, où son père enseigne à l'Ecole Normale.

Dès sa prime jeunesse, il étudie le piano avec sa mère. Son père lui enseigne le violon et l'orgue. De 1884 à 1889, l'organiste Adalbert Lindner lui donne une solide formation pianistique, basée sur la méthode de Hans von Bülow; Reger, qui est extrèmement doué, devient alors, entre sa 13ème et sa 16ème année, suppléant au poste d'organiste dans l'église catholique de la paroisse municipale. C'est lorsqu'il joue ainsi de l'orgue pour le service religieux, que son talent de créateur commence à s'épanouir. Conformément à l'éducation qu'il reçut de ses parents, la musique est pour lui un moyen d'exprimer sa propre religiosité. C'est à ce moment qu'il acquiert cette conception élevée et durable de l'art qui est, pour lui, le témoignage suprême, une attitude intellectuelle comparable à celle d'Anton Bruckner. Adalbert Lindner soumet les premiers essais de composition du jeune homme à Hugo Riemann, théoricien de la musique et pédagogue célèbre, ce qui a pour conséquence de permettre à Reger de commencer, en 1890, ses études musicales à l'Académie de Musique de Sondershausen, en Thuringe, auprès de Hugo Riemann. Lorsqu'à l'automne 1890, ce professeur, que Reger admire au plus haut point, part enseigner au Conservatoire de Wiesbaden, il le suit afin d'y poursuivre ses études. Tout en se livrant à l'étude de la grande littérature pianistique de Beethoven jusqu'à Brahms, il étudie minutieusement le "Clavier bien tempéré" de J.S. Bach, qui lui servira de modèle pour sa propre technique de composition, basée sur le contrepoint. Reger devient vite l'assistant de son maître respecté, en tant que chargé de cours au Conservatoire, dans les disciplines piano et orgue, et grâce à des revenus supplémentaires, obtenus en donnant des cours particuliers, il peut prendre son indépendance, étant à même de subvenir à ses besoins. Lorsqu'en 1895, Riemann commence à enseigner à l'Université de Leipzig, Reger prend également en charge la classe de théorie au Conservatoire de Wiesbaden. La maison d'édition londonienne Augener s'étant déclarée prête à publier ses oeuvres, il se présente alors au public en tant que compositeur. Johannes Brahms, à qui il soumet son opus 16, afin qu'il en fasse la critique, lui fait des compliments. Ferruccio Busoni l'incite à venir à Berlin. En 1895, il commence à écrire un concerto pour piano, à l'intention de Eugen d'Albert, mais cet ouvrage reste malheureusement inachevé. C'est également à cette époque qu'il fait la connaissance de Richard Strauss, avec qui il restera lié sa vie durant.

En 1896, le service militaire vient interrompre son incessante activité à Wiesbaden. Il s'avère que Reger n'est pas suffisamment solide, physiquement, pour répondre à ce que l'on attend de lui. Il tombe gravement malade et revient finalement chez ses parents à Weiden en 1898.

Durant son séjour à Wiesbaden, il fait encore deux rencontres très décisives. Il y fait la connaissance d'Elsa von Bagenski, sa future épouse, et rencontre à Francfort, au cours de concerts donnés à l'église St Paul, Karl Straube; du même âge que lui, un remarquable organiste et un interprète enthousiaste de la musique d'orgue de Reger. Ils seront liés par une amitié qui durera leur vie durant et dont témoigne une intense correspondance.

C'est durant son séjour à Wiesbaden, de 1898 à 1901, qu'il compose ses premières grandes oeuvres pour orgue, parmi lesquelles se trouvent ses vastes fantaisies de chorals. Il est très instructif de connaître les matières et les sujets qui intéressent Reger. Le chant religieux allemand le fascine. Il étudie l'"Inferno" de Dante. Il se livre continuellement à une analyse de ce génie qu'est Bach. Il étudie la littérature de son époque et compose des "Lieders" sur des textes de différents écrivains, qui lui sont contemporains. Tous ces détails nous permettent de mieux comprendre quelle vision intérieure du monde avait Reger.

Après le départ en retraite de son père, il quitte Weiden en 1901 et vit avec ses parents à Munich. En 1902, il épouse Elsa von Bagenski. Il se produit en tant que pianiste au cours de longues tournées. Il devient temporairement chargé de cours à l'Académie Royale de Musique. C'est durant son séjour à Munich que sont publiés ses op. 60 à 100. Son activité de chef de choeur, à la tête du célèbre choeur Porges, entreprise avec enthousiasme, ne dure qu'un an. Les programmes qu'il échafaude, en n'acceptant aucun compromis, ainsi que les éxigences extrèmes dont il fait preuve envers les chanteurs, mais également sa manière brutale de vouloir imposer ses fins musicales lui font perdre plus d'un sympathie. A l'Académie aussi, il est en proie à beaucoup d'hostilité, si bien qu'après la première crise portant atteinte à sa santé, une paralysie du côté droit, après un concert à Berlin en Avril 1906, il n'hésite pas à démissionner de son poste de chargé de cours. Des tournées de concerts le mènent jusqu'à Saint Petersbourg.

En 1907, il devient Directeur de la musique à l'Université de Leipzig. Parallèlement, il commence à enseigner au Conservatoire de Leipzig, en tant que professeur de théorie, poste qu'il occupera à vie. Sa production musicale à cette époque est importante, mais l'orgue est presque absent. Il est bien trop occupé par les compositions pour choeur qu'il doit écrire, la musique de chambre et les oeuvres pour orchestre. Malheureusement, il y rencontre à nouveau le même genre de problèmes qu'à Munich, si bien qu'il en arrive finalement à penser que sa situation munichoise était moins pénible, que celle qu'il connait actuellement dans son université de Leipzig. Il renonce à son poste de Directeur de la musique à l'Université et se limite à son poste d'enseignant au Conservatoire, qu'il tient à conserver. Tandis qu'à Leipzig il ne rencontre que des difficultés, sa renommée s'étend de manière surprenante dans le reste de l'Allemagne, en Europe et même aux U.S.A., et particulièrement en Suisse et en Angleterre. Au cours d'une tournée de concerts à Londres (1909), il est fêté avec beaucoup d'enthousiasme et ses oeuvres sont présentées dans de nombreux concerts.

En 1911, Reger est nommé conseiller aulique et appelé par le Duc Georg von Meiningen à la direction de l'orchestre de la Cour de Meiningen. Sous la direction de Reger, cet orchestre, qui fait de nombreuses tournées de concerts et doit faire face à des tâches de plus en plus importantes, devient un des orchestres de pointe de l'Allemagne et la renommée de Reger, en tant que chef d'orchestre, ne cesse de croitre. C'est pour lui l'occasion de faire connaître, d'une manière authentique, ses grandes oeuvres pour choeur et pour orchestre. A dire vrai, la plupart des oeuvres qu'il a composées durant son séjour à Meiningen sont destinées à l'orchestre, mais il écrit également deux grandes compositions pour orgue, les op. 127 et 129.

En 1914, il souffre d'une dépression nerveuse, due à ses inlassables tournées avec l'orchestre et renonce à son activité de chef d'orchestre à Meiningen. Mais alors qu'il est en convalescence, il écrit en 1914 déjà, ses "variations pour orchestre sur un thème de Mozart" op.132.

En 1915, il va s'établir à Jéna, où il réside dans sa propre maison. En dehors des "petits préludes de chorals" op.139a (écrits en partie d'après d'anciens modèles), il y compose la "fantaisie et fugue" op.135b pour orgue, dédiée à Richard Strauss, ainsi que les "Sept pièces pour orgue" op.145. Tout comme auparavant, il voyage beaucoup, étant très demandé comme chef d'orchestre et comme pianiste concertiste.

Le 10 Mai 1916, il a rendez-vous le soir à Leipzig, avec des amis, parmi lesquels se trouve Karl Straube. Durant cette réunion, il est victime d'une attaque d'apopléxie et on le ramène à l'hotel. Après avoir reçu les soins d'un médecin, il reste seul à l'hotel, où il meurt dans la nuit du 10 au 11 Mai.

Son ami Karl Straube nous dis:
"Je n'oublierai jamais l'expression de son visage. C'est la plus étonnante que j'aie jamais vue sur une face humaine. En chemin pour la pays inconnu, il doit avoir eu de puissantes visions. Et peut-être a-t-il eu des entretiens mystérieux avec son Dieu en personne, sur le sens et le but de sa vie. Et Dieu a reconnu en lui un de ses loyaux serviteurs. Car c'est justement cela qui caractérise la personnalité et l'art de Reger; il comprit toujours ce qui avait vraiment de la valeur dans les choses surnaturelles et spirituelles. Les grandes valeurs de sa vie étaient liées aux choses religieuses".

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D'après Peter Krams





La facture d'orgue

L'orgue néo-classique

Le métier d'organiste

L' improvisation

La "voix humaine"

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